Déplacer les montagnes

Comme le dit justement Plenel, « c’est reparti comme en 14 ». Une image sanglante, un odieux stimuli et le troupeau matamore tout en gueule de foncer dans le tas, direct dans le panneau, la fleur au fusil, une tranche de jambon en étendard.

Allons enfants de l’union nationale et de l’honneur sacré, le jour de vengeance est arrivé, cassons du barbare en Bougnoulie orientale, cet état islamique, ce monstre providentiel, notre monstre, tant nous étions orphelin d’ennemi à haïr pour mieux nous oublier.

Et les merdias charognards de se repaître et de montrer sans montrer tout en montrant à s’indigner et se goinfrer de tant d’ensauvagement, à surjouer la terreur, en plein mille du plan com d’en face pas si cons, une couche de compassion entre deux tranches de passion croustillante.

Et non, pas si cons, pas si fous, pas si archaïques que l’on croit, toujours à les sous estimer, qu’ils nous connaissent bien, qu’ils savent et la mise en scène et les codes et la cible, pour nous terroriser à moindre coût. Quand on n’a ni avions, ni drones, ni cette brillante technologie civilisatrice pour tout anéantir d’un simple joystick, une décapitation dans toute sa cruauté, un égorgement dans toute sa bestialité peut faire bien des dégâts et bien des dévastations.

– Mais que non, pensez donc, la France ne cède pas au chantage – nous déclare martialement ce qui nous sert de chef d’état, ce colonel moutarde déterminé qui ne cède à rien, sauf aux USA, à l’UE, au Medef, à Merkel, à Nétanyaou, aux bonnets rouges, aux pigeons, aux poussins…aux banques et à la finance qu’il combat vaillamment en leur roulant des pelles.

Que non, on ne cède rien ni à nos bons amis du Qatar, ni à nos clients d’Arabie Saoudite et autre pays du golfe et du pognon qui en ont tellement qu’ils peuvent jouer à cogner aujourd’hui ce qu’ils finançaient hier et réinstrumentaliser demain ce qu’ils bombardent aujourd’hui, à la condition que le chien ne morde pas la main qui les nourrit et ne dépasse pas le périmètre admis.

« Cesser de se rendre en cortège dans le golfe Arabo-Persique baiser les babouches de kleptocrates financiers du djihadisme » comme l’écrit Jean Guisnel dans le Monde ? et puis quoi encore ? manquerait plus qu’on devienne cohérent ! tant ce bordel apparent finit par nous faire nous demander si c’est pur machiavélisme que d’entretenir des foyers de guerre, créer du chaos partout pour diviser, épuiser, occuper, régner ou de la méchante connerie à vue basse.

Mais d’où vient donc ce monstre, dont il y a deux mois à peine, personne n’avait entendu parler, d’où vient donc cette bouffonnerie sordide de califat dont les membres actifs et autres djihadistes exaltés faisaient pourtant il n’y a pas si longtemps, d’après les dires de ce qui nous sert de ministre des affaires bien étrangères « du bon boulot » en Syrie ?

Peut-être n’est-il pas inutile de rappeler que de gros bouseux néo cons et ricains avaient eu la prétention d’exporter leur divine démocratie en Irak à coups de bombes phosphorées et au prix de quelques centaines de milliers de morts et autres dégâts collatéraux, qui n’eurent pas la gloire de faire la une des médias.

Peut-être doit-on rappeler que l’incompétent consul Paul Bremer, dans sa géniale opération de débaassification, envoya direct dans les bras terroristes des milliers d’officiers sunnites aguerris, surarmés et visiblement rancuniers.

Peut-être encore se souvenir que ces gros cons d’américains dont la spécialité est d’anéantir un pays pour y écraser trois mouches à merde sont à l’origine de tant de chaos de par le monde pour continuer à le dominer. Qu’ils nettoient et s’efforcent de remettre ce pays dans l’état où ils l’avaient trouvé en entrant.

On les avait prévenus. Ce n’est pas notre guerre. Chacun sa merde.

Qu’on se contente déjà nous, de réparer nos propres saloperies en Libye en y envoyant d’urgence le malotru Bismuth et le cuistre Botul passer la serpillière de leur sale vanité.

Et pendant ce temps-là tandis que le va-t’en guerre guerroie son propre monstre dans l’émotion nationale et le chant des canons, de renforcer nos lois anti terroristes, de mettre nos libertés sous surveillance et de masquer ces grosses cochonneries cuisinées en douce…

Tant que la finance avance…ça vaut bien de se payer sur la bête, de s’offrir un choc de civilisation, une guerre de tous contre tous, d’exiger que la Musulmanie s’excuse, ça vaut bien de mobiliser et sacrifier des milliers de gamins déculturés, désoeuvrés, en manque de sens et d’absolu, dont on n’avait rien à foutre ni aucun projet autre que le karcher…

Un boulot, ils ont fini par en trouver un : bombe humaine.

Au bout de tant d’années de guerre au moyen-orient, on pourrait peut-être faire le constat qu’un tapis de bombes ne semble pas le médicament approprié, que tuer 10 « barbares » pour en générer 100 n’est pas le calcul adéquat et que s’il faut bien se défendre après avoir tant massacré, la seule réponse n’est pas militaire mais politique.

En attendant, l’esprit d’Hervé Gourdel, homme libre des cimes qui connaissait le risque de partir à la rencontre des hommes et des géographies, hante les grandes montagnes de Kabylie.

Au prix de sa vie, il nous dit encore et malgré tout que le seul moyen de déplacer les montagnes, c’est de s’y déplacer.

tgb

Publié par rueaffre2

TG.Bertin - formation de philo - consultant en com - chargé de cours à Paris 4 - Sorbonne - Auteur Dilettante, électron libre et mauvais esprit.

16 commentaires sur « Déplacer les montagnes »

  1. Bravo !
    Nous sommes hélas entrés dans l’ère du cynisme depuis bien longtemps, excusant les gouvernants, leur prêtant tour à tour vulgarité, connerie, ignorance, incompréhension mais non… Comme tu l’as si bien déclamé dans ton billet, ils ont une bonne longueur d’avance et le font sciemment.
    A nous de faire, maintenant.

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  2. Mais quand je vois l’hystérie de ma liste sur Twitter pourtant de l’écrémé du cousu main qui part au quart du tour sur le retour de bismuth au coup de sifflet puis zappe au coup de sifflet suivant et part en guerre en hurlant qu’on en a dans le pantalon je me dis que c’est pas gagné

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  3. « si c’est pur machiavélisme que d’entretenir des foyers de guerre, créer du chaos partout pour… »
    Créer un chaos quasi planétaire, ils savent faire, maitriser et gérer quoique ce soit, c’est leur faire un bien grand honneur que de penser cela.
    Tout juste ont’ils parfois un coup d’avance dans la partie engagée.
    Le chaos est planétaire et multifactoriel, la seule certitude pour eux et pour nous c’est que cela ne va faire qu’empirer.

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  4. @markhoss -je me demande toujours s’ils sont vraiment balézes ou totalement nuls j’essaie de piger mais peut-être qu’il n’y a rien à piger
    @GdeC – merci l’ami et pour rester modeste sur ce coup j’en suis assez content

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  5. Excellent billet, comme d’habitute. Merci.
    Machiavellique? c’est leur faire un trop grand honneur. Machiavel defendait la republique en exposant les techniques immorales des princes pour se maintenir au pouvoir.
    Ils sont juste des menteurs, qui s’adonnent aux complots par gout autant que par necessite.
    Quand ils nous disent qu’ils vont faire la guerre pour sauver la veuve et l’orphelin on comprend bien que leur agenda est tout autre.
    Ils veulent juste garder leur position dominante et ils sont pret a tout pour ce faire.
    Ils ont au mieux la naïveté de croire en leur propre baliverne et s’approprie a force l’image charitable du sauveur liberal democrate. J’imagine que meme les pire tyrants ont probablement besoin de s’alimenter d’illusion mais on ne peut imaginer les autres capable de choses dont on est incapable soit meme.
    Et puis ce delectable plaisir d’être dieu, d’avancer un pion ici, d’envoyer un drone la.
    (Desole pour les absences d’accent et les fautes d’ortographe)

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  6. Sur la politique exterieure americaine et son rapport au terrorisme je vous conseille l’article de l’immense Noam Shomsky de Decembre 2001 qui etait repris dans le monde diplomatique:
    http://www.monde-diplomatique.fr/2001/12/CHOMSKY/8234
    Pour vous donner envie:
    Pourquoi, s’interrogeait le président Bush, des gens « peuvent nous détester », alors que « nous sommes si bons » ? Les dirigeants américains n’ont pas toujours conscience des effets à moyen et à long terme de leur détermination à toujours l’emporter contre n’importe quel adversaire.

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  7. Merci pour le lien un peu de Chomsky ne peut pas faire de mal
    Ça pour mentir ils mentent pour fabriquer du consentement ils fabriquent
    Prêts a tout oui mais s’il y a sans doute une stratégie ( la guerre) et de la tactique ( la bataille) j’ai surtout bien souvent l’impression d’une permanente improvisation et d’un beau bordel

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  8. alors vivement que les martiens débarquent
    david youssouf et françois on sera tous frangins contre l’envahisseur
    extraterrestre go home

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  9. Un texte que j’aurais aimé écrire car il développe avec talent ce que je barbouille laborieusement sur Twitter.
    Bravo.
    Et puis cette impression désespérante que nos blogs ne servent plus à rien à côté des médias traditionnels et autres sites plus ou moins influents.
    Quel journaliste ou influenceur de quelque importance parlera d’un billet aussi clairvoyant, Thierry ?
    Inconnus nous sommes, anonymes resterons !
    .
    Parce que tel est le destin de la plupart des blogueurs politiques de gauche, combattants bravaches des moulins à vent ! Ils méritent pourtant mieux !
    .

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  10. Avons nous jamais servi à grand chose ? Mais bon c’est juste qu’on se sent moins seul et puis on l’aura dit . Ça existe c’est déjà ça
    En tout cas merci pour le compliment ça fait toujours plaisir là où ça passe

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  11. Fais comme moi n’écoute plus rien sauf de la musique ne te laisse plus rien imposer ! quand plus personne n’écoutera , plus rien de tout ca n’existera et si des gens en veulent encore qu’ils en bouffent qu’ils s’en empiffrent à combler leur vide jusqu’à en crever ce n’est pas mon affaire . Je fais ce que je sais faire de toute façon je ne suis bon qu’à ça
    et toi raconte nous tes histoires, autant de petits moments jouissifs que nous partageons avec ravissement

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  12. Beurk, profond dégoût qui vient du bas ventre et qui remonte d un trait jusqu en haut.
    « Si je tenais l enfant de salaud… » (Cf J Brel) ben je ne serais pas quoi en faire… La merde ; dans une fosse / les déchets à la déchèterie / le boucher a la boucherie… Mais ça… Ch’rai pas quoi en faire… Démuni. Minable… Minable… Lâche
    Je te rejoins de tout bord et me dis qu il y a aussi cet « enfant d’salaud´ qui a fait ca et les autres qui vont continuer… En fait ça me touche car je me dis qu’un jour j’ai du croise sur ma route ce genre « d’enfant… » Et que la chance devait être avec moi. Beurk

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  13. lu ça à l’instant
    « Être sage, c’est quand on se trouve devant une montagne voir cette montagne, et rien d’autre. Une vie, en principe, n’y suffit pas. »
    Emmanuel Carrère (Le Royaume)

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