L’archétype du sale type

Sans en faire un cas personnel, le mis en examen dans l’affaire Tapie, Stéphane Richard, est l’archétype même du sale type qui pourrit de l’intérieur ou de l’extérieur, selon l’opportunité du moment, notre société déliquescente.

Ni pire, ni meilleur qu’un autre, il est le parfait représentant de l’oligarchie dans sa toute puissance, sa perversité et son impunité : on notera que malgré sa mise en examen pour escroquerie en bande organisée, il conserve son poste de président directeur général de France Telecom, ainsi que son salaire annuel d’un million cinq cent mille euros.

Le parcours de ce haut fonctionnaire soi disant de gauche, élu conseiller municipal de Bandol sur une liste de centre gauche en 89 et 95 avant de figurer sur la liste du maire UMP sortant en 2008, en dit long sur sa capacité à slalomer entre les lignes, à diluer par un réalisme bien senti ses convictions s’il en a, à jouer du pragmatisme, façon polie de nommer la défense de ses intérêts particuliers plutôt que l’intérêt général.

Cet énarque, diplômé d’HEC, devenu inspecteur des Finances, ce dirigeant d’entreprise publique autant que privée, pantouflant de l’une à l’autre, passant d’un ministère Strauss Kahn à l’état major Messier, de Véolia à Borloo puis Lagarde, de Sarko à Hollande est le « pur produit de l’excellence française » dixit Challenges, à savoir, cette charnière privilégiée, cet interface protégé public/privé, bref un permanent et intolérable conflit d’intérêt ambulant.

Cumulant à la fois les privilèges de la haute fonction publique autant que les libéralités de l’entreprise capitaliste, un jour au service du profit, le lendemain à celui de l’administration, ce brouilleur de lignes de gauche de droite ou du centre, ce mélangeur d’ intérêt personnel et public, ce jongleur de responsabilités sans en avoir jamais à en assumer quelque conséquence est le parfait révélateur des dérives d’un système clanique.

Assisté tout autant que profiteur.

L’ADN éloquent et fondateur ENA/HEC est la marque même de ce glissement progressif vers tous les abus, toutes les permissivités, de la dérégulation à l’amoralité et du mélange des genres.

A ce petit jeu tout confort d’aller retour en classe affaires, de mercenaire de la nomenklatura, la fortune de Richard est aujourd’hui estimée à 35 millions d’euros soit, rapport à sa formation initiale par l’état, un sacré retour sur investissement pour sa gueule.

On ne s’étonnera donc guère que cet assujetti à l’ISF, ne soit pas un farouche partisan de la lutte des classes, qu’il exige d’un bord à l’autre, précarité, austérité et réformes et qu’en termes de retour d’ascenseur, il ait forcément le bouton facile vers les étages supérieurs et soit solidaire de sa caste.

Ce présumé innocent, servant pour une fois de fusible, s’il n’est pas coupable est absolument responsable d’avoir joué de toutes les ambiguïtés, de toutes les compromissions, de toutes les facilités.

Il est le révélateur d’une corruption légalisée d’une élite.

Il est à ce titre, lui et sa clique, le prototype même du scandale.

tgb

Publié par rueaffre2

TG.Bertin - formation de philo - consultant en com - chargé de cours à Paris 4 - Sorbonne - Auteur Dilettante, électron libre et mauvais esprit.

5 commentaires sur « L’archétype du sale type »

  1. « Stéphane Richard: le roi du conflit d’intérêts à Bercy » est le titre d’un chapitre dans « Histoire secrète du capitalisme de 1945 à nos jour » paru en 2009 aux éditions La Découverte.
    Rien que le titre nous fait comprendre le parcours de ce magouilleur de « haute volée » placé en garde à vue en 2006 (affaire Vivendi) mais bizarrement non mis en examen…quelques semaines avant de recevoir la Légion d’Honneur!!!!!
    Le bouquin mentionné ci-dessus (700 pages!)nous révèlent les sources de la plupart des plus grandes fortunes du pays…trés loin de la légende du « Self-made-man », plus proche du parasitisme qui a saboté notre économie.

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  2. LES SALARIES D’ORANGE l’adorent, lui au moins ne considère pas le suicide des employés comme une mode mais comme une nuisance évitable dans l’entreprise…Chez eux, ils font ce qu’ils veulent, c’est ça, la démocratie.

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  3. @Robert Spire – merci pour la référence- connaissais pas –
    @rushes.infos – ben oui quoi suicidez vous chez vous c’est quand même plus propre
    bon cela dit au-delà du cas Richard c’est surtout ce système qu’il faut démonter

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