
Si l’on peut rire de tout mais pas avec n’importe qui, selon l’expression de l’impeccable Desproges, si l’on DOIT rire de tout, de toutes les religions, de toutes les conditions, de tous les handicaps, des petits, des gros, des maigres, des riches et des pauvres, des belges, des français, des sénégalais et des chinois…, de l’autre et de soi,

si l’on doit rire de ce qui fait peur, de ce qui fait mal, de ce qui gène, de ce qui trouble, de ce qui nous dépasse, de nos angoisses surtout pour mieux les apprivoiser, les exorciser en exutoire, cette délicate politesse du désespoir, encore faut il que ce soit drôle.
On peut se moquer du physique, c’est le principe de la caricature, on peut se moquer du statut, on peut transgresser, on peut choquer, provoquer, mettre mal à l’aise, forcer la dose, charger, décharger, exagérer, décaler, décalquer, dézinguer, on peut faire dans le scato, (perso j’ai toujours eu un faible pour le pipi caca) dans la dentelle, on peut faire dans le grossier, le relou, on peut faire dans le cynisme, dans l’acide, le sarcastique, le grinçant, on peut se foutre des hommes, des femmes, des transgenres, des faibles et des puissants, de Macron et de sa dame, des hétéros burnés, des homos, des zamelles, on peut rire des vieux et des mômes, des bossus, des moches, des bellâtres et des Mimi Mathy, on peut se foutre de tout et de tout le monde dans la mesure où c’est drôle. et des fois ça l’est pas !
Exemple numéro 1 – le dessin de RISS à la une de Charlie Hebdo (je ne suis plus Charlie depuis Val) :

Il sue la haine, transpire le mépris, il fout la gerbe, mais le pire de tout, il n’est pas drôle ! pas même un sourire. Il n’a donc aucune excuse. C’est raciste et raté, c’est nul et c’est con : c’est de la merde.
Exemple numéro 2 – Sur le même thème avec à peu près le même message le dessin de Foolz :

C’est plutôt sans intention maligne, ça dit à peu près la même chose mais mieux, ça suinte pas la haine, ça pue pas du bec et du printemps républicain, surtout ça me fait marrer. c’est juste juste et juste drôle : C’est réussi.
A quoi ça tient ? à la nuance, à la subtilité des choses, au talent, à l’ intention, selon qu’elle soit malsaine ou pas, blessante ou pas, médiocre ou pas ? va savoir …
Chaplin disait privilégier toujours l’inspiration sur l’intention. Riss et ses potes à la dérive nauséeuse, en tout, cas feraient bien de méditer.
Ce qui fait que c’est drôle ou pas, réussi ou raté tient effectivement à pas grand chose. A une forme de légèreté dans la profondeur, de spontanéité travaillée, à tout un tas de paradoxes qui fait que ça tombe pile ou pas.
Et que ce soit grivois, myso, finaud ou pas, odieux, scabreux, crado ou pas n’est pas le problème.

Le problème c’est le contexte, avec qui quand comment sortir sa blague juive préférée, celle sur les arabes ou les gaulois, sur Hitler ou Staline et sur le dernier tsunami ou tremblement de terre aux 100 000 morts.
Le problème c’est que quand on touche à des sujets délicats, périlleux, sulfureux, en tension, en friction et que ça tombe à plat, ce n’est plus rigolo c’est juste fâcheux…
et facho.
tgb
T’as été échaudé à un diner par les blagues de beauf au dessert ?Tu as raison, Les ricanements de haine ne sont pas du rire. Et les bons humoristes ne s’en servent jamais.
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ricanements de haine c’est bien le mot
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Bien d’accord.
Pas Charlie depuis Val. Surtout après la lecture du bouquin de Denis Robert. Parce que Val n’est pas seulement de droite extrême, un arriviste ou un opportuniste, un pédant qui étale son vernis culturel, c’est surtout un exploiteur, un affair is te et un cynique.
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en un mot une belle ordure – et la manière dont il a lâché Font …
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TGB, tu as un faible pour le scato, moi aussi, avec « légèreté et profondeur », « de par ma chandelle verte bougres de merdre, merdre de bougres » Collomb et trou de Val.
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Dans l’humour les clichés ont la vie dure, c’est peut-être drôle mais souvent ils rabaissent la dignité de ces populations victimes depuis des lustres du complexe de supériorité de gens pourtant instruits. Ridiculiser les religions est impératif et peut se faire sans recours aux stéréotypes racistes, comme l’écrivait dans les années 70, Edward W Said: « (…)Juste après la guerre [1939-45] Les Arabes étaient ainsi passés d’un vague stéréotype de nomades montés sur des chameaux, à une caricature classique les montrant comme l’image même de l’incompétence et de la défaite: c’est toute la latitude qui leur était laissée. Mais, après la guerre de 1973, les Arabes ont partout paru plus menaçants. On rencontre constamment des dessins humoristiques représentant un cheikh arabe debout à côté d’une pompe à essence. Pourtant, ces Arabes sont clairement des «Sémites»: leur nez nettement crochu, leur mauvais sourire moustachu rappellent à l’évidence (à des gens qui, dans l’ensemble, ne sont pas sémites) que les «Sémites» sont à l’origine de toutes «nos» difficultés, qui, dans le cas présent, consistent dans la pénurie de pétrole. L’animosité antisémite populaire est passée en douceur du juif à l’Arabe, puisque l’image est presque la même. Ainsi, si on fait attention à l’Arabe, c’est comme à une valeur négative. » (« L’orientalisme »)
Et avec l’expression « pénurie de pétrole » on peut ajouter toutes sortes de calamités, la théorie du bouc-émissaire (assistés, migrants…) fonctionne à plein grâce à la montée de l’extrème-droite.
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Beau texte merci Robert
Et merdre à tous les Ubu rois
Et leurs dames
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Comme disait Alphonse Allais: « Je ne plaisante jamais avec l’humour », ou plus philosophe: « Toute plaisanterie doit être courte, et même le sérieux devrait bien être court. » (Voltaire)
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railler est au rire ce que émousser est à l’esprit
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Y a beaucoup de mousse en effet
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Après tout, umour, c’est amour avec une échappée belle sur le haut du a grâce à un coup de h (inspiré ?)
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Vive le h
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