Qu’un sang impur…

Chez les gens bien mis, on prend toujours soin de tirer des missiles en costume cravate. On a l’extrême obligeance de s’essuyer la conscience sur le paillasson avant que d’exploser la gueule de l’humanité à coups de bombes propres sur elles, subtilement chirurgicales, qui ont la délicatesse de frapper avant d’entrer.

C’est une marque d’hygiène élémentaire et de bonne éducation versaillaise.

Oui, chez les opportunistes à la carrière tirée à quatre épingles, on fait de la politique sans auréoles sous les bras. On a les valeurs propres parce qu’on n’a pas de valeurs. On a la parole impeccablement repassée. On change de conviction comme de slibard tous les jours et on passe à la machine sa signature histoire de pas trop puer la sueur.

On lave, on délave.

Non, chez les petits marquis tout poudrés, les aristos de l’ascenseur en chaise à porteur, on ne se permettrait pas de sortir sans cravate. On a l’argent sale peut-être mais la pochette assortie, on a l’opinion modulable mais le pli du pantalon strict et vertueux. Car rappelons le encore, le meilleur moyen de se payer un costard, c’est de travailler faire trimer les autres.

En revanche notons que chez les feignants d’en face, les grévistes, les activistes, les zadistes, les prolos, les gauchos, les riens, les punks à chien, les assistés, les incultes, la racaille, les pouilleux, les crasseux, les sans dents, les gueux…bref les nuisibles, on laisse toujours les universités occupées (insalubres depuis des années) dans l’état où on ne les a pas trouvées en entrant, après s’être adonné au sexe, à la drogue, à la prostitution et à la violence (tiens pourquoi pas à l’alcoolisme ?).

On a l’interview déboutonnée sans même donner du « monsieur le président », on a la tenue débraillée et forcément les idées qui vont avec, on souille, on pullule, on pollue, on pisse à côté, on ne fait pas là où on nous dit de faire :

On n’est pas fréquentable. On n’est pas respectable. On est sale.

Dans la bonne société où l’ordre de la femme de ménage exploitée mais startupeuse règne, on ne confond pas l’écologie bien peignée, bien rangée sur l’étagère du fond avec l’anarchie toute avachie.

On a le mépris, la morgue ou l’arrogance toujours bien épilé du maillot. On licencie en smoking, on expulse avec déodorant. On embastille les gosses peut-être mais avec l’haleine fraîche, on matraque sans doute mais toujours scrupuleusement manucuré.

On n’aime pas les chemises arrachées

On aime les chemises grises.

Oui, dans cette bonne bourgeoisie glabre, rasée de frais, on pratique la guerre au nom de l’humanitaire, on préfère la milice en uniforme plutôt que le juste hirsute, on donne de la charité mais jamais la justice, on libère ses sphincters au micro de radio bistrot pour mieux balancer du stéréotype sur l’opposant mal léché, mal lavé mal blanchi, mal élevé, mais sans mettre son doigt dans son nez.

Enfin faut voir…

Oui, chez les gens bien, on a l’idée crade certes, la pensée dégueu sans doute, la diarrhée verbeuse comme jamais, mais la mimine gantée et les ongles vernis. On fait semblant de disrupter le petit doigt en l’air. On jette de la menue monnaie du haut des balcons particuliers. On s’offusque du déboutonné pour mieux piétiner les blouses blanches entre deux blanchisseurs.

On baise les babouches ensanglantées avec distributeur. On privatise les profits, on socialise les pertes. ON vend, on brade, on récompense, on ristourne aux riches amis fraudeurs, on traque, on stigmatise on culpabilise le petit gratteur de rien. 



Leur morale n’a pas d’odeur. Celle qu’on nous inflige pue.

Ils sont purs, nous sommes impurs c’est une affaire entendue, tranchée, définitive et totalement récurrente durant les siècles des siècles, car plus c’est moderne et plus ça sent sa vieille lune.

Alors oui et pour en finir avec ce malentendu de la marseillaise, quitte à s’en prendre plein la gueule, à se faire insulter, cracher au visage par les bien nés, les cuillerés de la bouche en cul de poule, leurs valets, leurs larbins, leurs chiens policiers et leurs chiots de micro, qu’un sang impur, le notre, celui qui n’est ni de sang royal ni de sang bleu, abreuve à nouveau nos sillons.

Ce n’est pas à coups de pistolet à eau qu’on se fera respecter.

Puisque nous sommes affreux et sales, devenons enfin méchants !

tgb

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Publié par rueaffre2

TG.Bertin - formation de philo - consultant en com - chargé de cours à Paris 4 - Sorbonne - Auteur Dilettante, électron libre et mauvais esprit.

7 commentaires sur « Qu’un sang impur… »

  1. c’est tout immaculé et compagnie avec cette ahute idée de soi même et de l’entre soi mais ouais ça refoule forcément du goulot

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  2. Bien que n’étant pas le seul, de Rugy c’est quand même quelque chose. En effet voilà un individu qui trône sur le siège de président de l’assemblée après ses trahisons et ses parjures. Sa presence là où il est parvenu c’est de la publicité pour l’immoralité

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  3. C’est vrai, j’ai tout de même des voisins sympas… d’ailleurs sa permanence a eu parfois de petits ennuis… (pas de mon fait, il y en d’autres que cela gêne, sans doute)

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