Faut-il tondre Henry-Claude Cousseau ?

Quatre bannières noires avec les mots “travailler”, “moins“, “gagner”, “plus”, inspirées d’un slogan anachronico-simplet, accrochées à la façade de l’Ecole des beaux arts dans le cadre d’une exposition d’étudiants et voilà qu’Henry-Claude Cousseau, directeur zélé de l’établissement, trouve l’œuvre « trop explosive pour rester in situ » et la censure bravement par anticipation offusquée, avant que le ministre de la Fredoculture annule judicieusement la décision.

Outre que pour la jeune artiste d’origine chinoise Ko Siu Lan, se faire interdire en France doit méchamment remettre en cause sa vision  de la carte géographique de la libre création, l’invention par Henry-Claude Cousseau du concept de l’art neutre qui doit surtout pas déranger à la saison des subventions nous met en exergue la mécanique de l’autocensure intégrée.

Où comment devancer par excès de zèle, goût de la reptation, et opportunisme rampant, les hypothétiques demandes liberticides du château. 

Le principe même de la collaboration par la lâcheté ordinaire et motivée.

Que risquait donc Henry-Claude Cousseau qui grâce à sa performance de défécation en ses frocs carriéristes vient de passer du gris anonymat où il semblait tranquillement prospérer à l’incarnation patronymique du veule fonctionnaire agenouillé, prêt, par servilité civique à dénoncer  » l’art dégénéré ? »

Rien ou si peu.
Pas de finir dans quelque camp de rééducation en tout cas, ou de mourir pour la cause, mais au pire du pire, de se faire un peu mal voir du côté du mari de Carla épidermiquement chanteuse et fils de Pal sensiblement peinturlureur,  ce qui eût pu freiner peut-être, le bon déroulement de son plan de carrière.

Nul besoin donc de censure arbitraire un peu voyante, un peu sale, quand, dans une France au climat spongieux et délétère, le principe de l’autocensure fonctionne à plein et que le caniche bien dressé au susucre, se couche avant même qu’on lui en donne l’ordre. 

On n’est pas sous Pétain certes, mais le mécanisme en reste le même, car si en risquant si peu en ce régime, on se coucouchepanier déjà, on ose imaginer le comportement de ce genre de pleutres durant l’occupation.

Dans ce système trop sympa où chacun consciencieusement devient son propre flic et le flic de l’autre, où la délation est élevée au rang de cause nationale, inutile de lâcher les chiens puisque les chiens eux-mêmes enfilent leurs muselières.

C’est le syndrome de la carpette ordinaire, du chef, sous chef, au moindre pouvoir minable, du chefaillon simple exécutant (je n’ai fais qu’obéïr aux ordres) du maillon quelconque mais essentiel d’un encadrement au service de quelque autorité qui ne peut exister sans kapos sans valets.

On devient larbin  donc, par conviction, par intérêt, par suivisme  ou par peur. Peur de déplaire, peur de perdre son boulot ou son salaire, peur de manquer le prochain échelon, peur de sa propre peur.

Or la peur ne fonctionne que si on lui cède. Or le pouvoir n’avance qui si le contre-pouvoir recule.

Les journalistes témoignant, n’avoir jamais subi quelque pression que ce soit dans le cadre de leur boulot, m’ont toujours fait marrer. Car il suffit en général de rester dans le cadre de références définies, de ne pas dépasser les limites circonscrites, bref de la fermer là où il faut quand il le faut, de penser avec le chef et comme le chef, pour ne pas trop souffrir d’affres et d’insomnies.

Les insomnies n’empêchant pourtant pas de dormir, comme tout le monde le sait ou devrait le savoir.

tgb

Publié par rueaffre2

TG.Bertin - formation de philo - consultant en com - chargé de cours à Paris 4 - Sorbonne - Auteur Dilettante, électron libre et mauvais esprit.

26 commentaires sur « Faut-il tondre Henry-Claude Cousseau ? »

  1. Oui, mais quelles sont vraiment les « responsabilités » ?
    Est-il concevable que cette oeuvre ait été installée sans l’aval (en 2 mots) de Cousseau ? Il serait étonnant que le directeur n’ait à aucun moment suivi le processus de création, de choix de l’oeuvre, d’installation…
    Les ordres sont peut-être venus « de plus haut », après quelques plaintes ou remarques à la suite de la vision de l’installation, puis les « contre-ordres » du même endroit, laissant Henry-Claude Cousseau comme seul agent zélé puis contredit par sa hiérarchie…
    Il serait intéressant de connaître le strict déroulement des événements.

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  2. apparemment suite à cet accrochage des retours offusqués des ministères auraient convaincus HCC de tout replier dans les cartons – mais pas d’injonctions
    il y a toujours des gens offusqués plus royalistes que le roi –

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  3. Povre Monsieur COUSSEAU, tout obligé qu’il se sent de faire rentrer son Ecole des beaux arts dans le moule des réformes imposées par l’Europe.
    Clare Carolin, du Royal College of Art de Londres, commissaire de l’exposition a relaté ce qui lui a été dit par le Directeur Monsieur HC Cousseau:  » le moment est délicat car l’école est en train de renouveler sa convention de financement avec le ministère »
    Gageons qu’avec un tel courage il n’y aura pas beaucoup d’opposition quand
    la privatisation des écoles d’arts va pointer son nez, ce que ne saurait tarder!

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  4. Pinault va bien nous les acheter pour les installer à Venise. Les étudiants à 100 000 euros l’année scolaire en ramassage vaporetto : la classe

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  5. Moi j’avais posté sur un blog que j’espérais que la fille devienne célèbre et qu’au prochain accrochage à l’étranger soit indiqué : Oeuvre de Ko Siu Lan censurée en 2010 par le pouvoir français
    Mais entre temps Mitterand a tranché , il l’a autorisé , il a peut être peur d’être taxé par l’histoire française à venir sur cette période trouble dans laquelle nous vivons

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  6. en tout cas et comme à chaque fois ce fut une très belle pub pour elle – on aurait voulu la faire connaître qu’on aurait pas fait mieux

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  7. « Oeuvre de Ko Siu Lan censurée en 2010 par le pouvoir français  »
    Aucune preuve de celà, Françoise, les pleutres s’auto-censurent dans une espèce de délire prananoïaquen car effectivement le travail de sape du gouvernement en place ( la propagande si vous préférez ) est diablement efficace.

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  8. devancer la demande (hypothétique) du pouvoir évite au pouvoir de recourir à la censure – que du benef
    paranoïaquen c’est bien aussi

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  9. Une anticipation pour raisons financières, il espère redorer son image avec cet argument tout en accablant (plus) le gouvernement qui sucrerait son financement pour cette raison. C’est hilarant, non ? ;-))

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  10. C’est amusant de constater a quel point la soumission beate de certains leur fait perdre tout sens des valeurs et de la realite.
    C’est au pouvoir de craindre les artistes. C’est au pouvoir de craindre les journalistes. C’est au pouvoir enfin de craindre la colere du peuple.
    Ce que je trouve le plus abject, dans cette histoire ubuesque, ce n’est pas meme pas le fait d’avoir ordonne le retrait de l’oeuvre, c’est cette impression de silence criant de la part des artistes environnants…
    J’ose esperer me tromper. j’ose esperer qu’ils se sont revoltes contre leur directeur, en bloc et unanimement. Dans le cas contraire, j’en concluerais qu’ils n’ont strictement rien a faire dans ce milieu.

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  11. Monde à l’envers…
    Plus d’éléctions en 2012! Coup d’état du Général SARKO…!
    La Chine du Dalai lamma demande intérvention de l’ONU!

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  12. @Hansi – pas idéaliser les artistes – i l y a la même proportion d’arrivistes de larbins que chez les plombiers ou les dentistes à mon avis
    @Nats – l’artiste par nature cherche aussi des subventions
    @Harder – crédible

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  13. …L’ONU annexé par le « général » pour garder la tête haute annexe a son tour la Chine du gentil Dalaï pour le « protéger » et pour finir tentative de mondialisation de la « belle et grande » doctrine républicaine : « liberté, égalité, fraternité » …. Que vive le Général !! ;o)… revanche de la Gaule sur l’empire romain

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  14. la censure sous l’actuelle direction des beaux arts de paris et de la très mauvaise (nouvelle) équipe qui l’entoure est continue.. ce malaise qui est ressorti tout le monde le subit, cette peur permanente d’être censuré par cousseau dans l’école… il a viré les meilleurs éléments de l’école, d’autres n’ont pas tenus et sont partis de leurs propres gré, le peu qui tiennent sont essoufflés, même ses collabos les pires de sa tour d’ivoire !…
    cette histoire de censure de cousseau est inacceptable ! POUR SA DEMISSION DES BEAUX ARTS !!!!

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  15. Que de naïveté dans « l’oeuvre au noir » ou en Noir » de cet art triste MR Ko Siu Lan qui magnifie une élucubration bling bling. Pas de quoi révolutionner un ordre ou de de réveiller des « cons sciencieux »

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  16. @lecteur anonyme – merci pour le témoignage – donc il faut tondre le commandant Cousseau !
    @bill – ok d’accord c’est peut être pas renversant – c’est encore plus ridicule donc de l’interdire

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  17. Tu es très en forme, c’est impressionant.
    1984 est le livre que je finis toujours par relire au bout de quelques années depuis l’adolescence.
    Je crois que je te dis ça pour t’expliquer à quel point je suis d’accord.

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  18. ben ouais y’a des périodes où ça sort mieux que d’autres comme si on touchait la veine ça contrebalance les journées où on tourne en rond à pas savoir que dire et à pas avoir envie

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