Jeanne au Fouquet’s

En ces temps de guerre économique où flottait l’étendard sanglant AAA, Jeanne de Roms se leva un matin d’hiver, sortit frigorifiée de sa caravane de misère, s’arrêta tout près du brasero au beau milieu du campement de fortune édifié sur la terre lorraine, et entendit des voix : « Jeanne ma fille va bouter l’oligarchie financière hors de France !!! »

Aussi sec, Jeanne la plus ou moins pucelle, enfila un vieux jogging pourri, mit sa casquette à l’envers puis enfourcha sa mobylette pour cavaler, façon Mollah Omar, jusqu’à la capitale du royaume.

Ce jour-là précisément, Charlot 1er dit le Nabot, candidat-roi de France, juché sur ses échasses remettait dans les ors du palais du Fouquet’s, la légion d’honneur aux irremplaçables ménestrels ‘Stone et Charden’.

Fourbue, rompue, Jeanne se fraya un passage entre les têtes à claques de la clique courtisane UMP, se joua de la garde rapprochée des hallebardiers à oreillette et fonça direct sur le roitelet qu’elle reconnut d’emblée à son air de ‘sale mec’ à salamalecs en suppliant à genoux : « citoyen président boutons l’oligarchie bancaire hors de France et la TVA antisociale itou »

Interloqué et dédaigneux, Charlot 1er fort inspiré eut cette réplique fameuse et lapidaire :« casse toi pov’conne !!! »

Illico une volée de noires matraques tombèrent sur la gueule de la petite Jeanne, dans un concert de quolibets choisis des notables flagorneurs :

– Encore un de ces minables manants à moins de 5000 écus mensuel’ déclara plein de morgue le baronnet de Meaux en se bouchant le nez.’

– Chassez moi cette analphabète qui cause la France en verlan’– pouffa à gros sabots l’écuyère à soupe Nadine de Medrano, un bout de salade coincé entre les dents.

– Est ce qu’elle a ses papiers la manouche pas catho ?’ – s’inquiéta le marquis de Guéant tout à ses statistiques ethniques et à sa circulaire, réprimant difficilement une divine érection.

Deux gardes en armure, genre robocop, empoignèrent vigoureusement la petite Jeanne de Roms, hébétée et meurtrie, entre deux sales visions de zapping à la télé.

Mise en garde à vue, puis placée au camp de rétention de Vincennes, elle fut après un procès expéditif en hérésie identitaire, expulsée manu militari par charter en Hongrie où la police d’Orban la condamna immédiatement aux travaux forcés.

Elle mourut quelques mois plus tard victime de la tuberculose.

Ainsi disparut la petite Jeanne de Roms sans que naisse jamais ni le moindre mythe, ni la moindre légende à son (mauvais) sujet.

tgb

Publié par rueaffre2

TG.Bertin - formation de philo - consultant en com - chargé de cours à Paris 4 - Sorbonne - Auteur Dilettante, électron libre et mauvais esprit.

8 commentaires sur « Jeanne au Fouquet’s »

  1. Hongrie: la dérive nationaliste: hé  » l’homme libre », c’est l’UE qui a apporté cette Hongrie…. Et pas d’amalgames faciles!

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  2. AH AH !! Bravo , merci pour ton billet « Jeanne de Rom  » il fallait y penser , un vrai scénario pour metteur en scène inspiré ou pourquoi pas une BD

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  3. @ Françoise D : Tout a fait d’accord avec vous ,cet article est « grandiose « ,en parfait accord avec la situation actuelle de notre Pays …. Merci a l’auteur !

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  4. A la hauteur largement de ce que j’attendais .
    La description « des têtes à claques « et de Charlot 1er est tellement précise qu’à la lecture , on les imagine aisément .
    Et bien , j’aimerais que Jeanne de Roms devienne la légende des événements de cette période (merdique ) de notre histoire .
    TGB , excellent , merci !

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