L’humaniste manager

Enfermé dans sa novlangue corporate, le top crétin manageur qui dirige la nation comme une entreprise, parvenu à son niveau d’incompétence jargonneux nous déclare : « le gouvernement va corriger les choses pour que l’humanité retrouve l’efficacité ».

De l’humanisme efficace, voire performant, ça aurait tout l’air d’un oxymore mais faudrait voir à pas trop exiger de la pensée complexe tout autant que rudimentaire, tant l’humaniste pdg parle couramment le con et par exemple : « Si tu veux faire la révolution, tu apprends d’abord à avoir un diplôme et à te nourrir toi-même ».

Il faut bien reconnaître au super manager de la macronie agonisante que côté humaniste, il nous gâte.

Et c’est ainsi que guidés par un « objectif d’humanisme » (ils ne peuvent pas s’empêcher) en pleine épidémie mondiale, les gestionnaires de matériel humain votent la suppression de l’aide médicale aux étrangers en situation irrégulière, remplacent une grenade mutilante par une autre plus mutilante encore dans un contexte de violences policières qui n’existent pas selon Sibeth Ndiaye mais qui sont systématiquement sanctionnées selon la même Sibeth Ndiaye et s’apprêtent à dépecer nos forêts aux temps longs dans le temps court qui leur est imparti. La start up nation en ses fins algorithmes assureront la repousse.

Oui, ‘ trop facile de s’acheter de la générosité sur le dos des entreprises », trop facile, Sereine Mauborgne, que de mettre en péril les multinationales gavées de CICE, pour accompagner les enfants handicapés, cancéreux, ou même pour enterrer nos petits anges qui ne deviendront même pas milliardaires…trop facile de dilapider ce pognon de dingue qu’on n’a pas mais qu’on trouve toujours quand il s’agit de primes aux non grévistes tout en retirant un jour de salaire aux profs ayant été aux obsèques de Christine Renon directrice d’école suicidée, ou de lâcher 1,5 milliards par an pour un SNU, à endoctriner la jeunesse macronarde dans des panoplies de majorettes au lever de drapeau, tandis qu’on met en garde à vue des lycéens refusant de passer le bac encadré par la BAC, pour faire passer l’envie aux autres, que ça leur fera au moins des souvenirs.

Rappelons incidemment, que ce sont ces mêmes gens, qui passent leur temps à nous culpabiliser avec la dette, la dette, la dette, que nous laissons à nos enfants ce qui ne les empêche évidemment pas de coller du pesticide à 5 mètres des écoles, tellement l’avenir de nos mômes les obsède et la FNSEA.

C’est à ces petits riens qu’on perçoit toute l’humanité de ce gouvernement peuplé de cadres d’entreprise, de DRH productivistes tout à leur cafouillage entrepreneurial et champions du pilotage par statistiques et de la disruption dans le fossé ; inventeurs inspirés, d’un service payant à la poste pour discuter 5 minutes avec une personne isolée alors que ça se faisait spontanément avant la gestion du temps et la rationalisation des coûts ; concepteurs novateurs de sièges wc sournoisement inclinés afin que le petit personnel ne s’éternise pas à caguer. Oui c’est à ces petits riens qu’on reconnait l’extrême sensibilité exacerbée de ces comptables à kilométrages limités tout à leurs séances de reporting, benchmarking et de powerpointing à tout quantifier ; le prix d’un pneu de chez Michelin, d’un enfant mort né, d’une femme battue, avec numéro vert surtaxé, entre start up mon cul et call center ; à tout désigner, Bedmanager, Streetmanager, gardechampêtremanager… en ce sinistre globish pour décérébrés acculturés fanatiques du management par la terreur.

  • Comme on lui en avait donné l’ordre, Eichmann était simplement incapable de penser. Hannah Arendt

Incapables de penser ou d’aimer sans compter oui, toujours dans le combien tu m’aimes ? dans le combien tu rapportes ? dans cette mesquinerie robotisée de playmobils sans conscience, tandis que les éboueurs ou les égoutiers à l’espérance de vie réduite font grève et que les bataillons d’ éditocrates autrement moins indispensables mais autrement mieux payés, tout à leur macr’onanisme quotidien, font des commentaires indignés sur les poubelles.

Constater alors que les ordures qui prolifèrent ne sont pas sur les trottoirs et que les rats qui infestent les rues paradent en robocops.

tgb

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Publié par rueaffre2

TG.Bertin - formation de philo - consultant en com - chargé de cours à Paris 4 - Sorbonne - Auteur Dilettante, électron libre et mauvais esprit.

9 commentaires sur « L’humaniste manager »

  1. Macron « le progressiste humaniste » qui réforme (« révolutionne » selon son bouquin-programme) pour notre bien…C’est fou comme sa politique colle avec la théorie néolibérale que Walter Lippmann (père du néolibéralisme) explicite dans « The Good Society » (1937)
    Le « bon choix » disait Giscard, il n’y a qu’un choix comme dans toutes dictatures…

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  2. Toi, tu es en pleine forme ! Et c’est une belle jouissance de te lire…

    Juste une remarque histoire de faire chier les macronards. Tu écris « lâcher 1,5 milliards par an pour un SNU » et là tu as tord. Tu connais pas encore assez bien ces roublards. Le SNU va plutôt coûter trois bons gros milliards selon les connaisseurs.

    Mais foin de la calculette, on se branle du nombre de milliards puisqu’on ne lâche rien, ils seront pris intégralement sur le budget de… l’Éducation Nationale ! Et d’aucuns de prendre la calculette et de nous dire que les profs, s’ils ne sont pas prêts de voir une augmentation de salaire, verront par contre très vite une augmentation furieuse des effectifs de leurs classes… Sans compter qu’ils faudra qu’ils se tassent un peu pour faire de la place au SNU aque ça se fera dans les établissements scolaires.

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    1. merci mon camarade – oh plus rien ne m’étonne ils ne mentent même plus ils sont le mensonge incarné – une chose et son contraire dans la même phrase et quant aux actes mieux vaut pas regarder ils sont tellement mesquins et vicieux que s’en est déprimant

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  3. Un petit rappel d’un philosophe contemporain d’Hannah Arendt et proche sur les idées.

    « Une classe d’experts est inévitablement tellement coupée des intérêts communs qu’elle en devient une classe avec des intérêts privés et une connaissance privée, ce qui, en matière sociale, n’est pas une connaissance du tout […] Tout gouvernement par les experts dans lequel les masses n’ont pas l’opportunité d’informer les experts sur leurs besoins ne peut être autre chose qu’une oligarchie gérée en vue des intérêts de quelques uns. Et l’information éclairée (enlightenment) doit se faire d’une manière qui contraigne les spécialistes administratifs à prendre en compte les besoins. Le monde a plus souffert des leaders et des autorités que des masses. » John Dewey (The Public and Its Problems – 1927)

    Dewey, longtemps oublié puis remis au goût du jour (néolibéralisme thatchero-reaganien oblige) par James Carey, Noam Chomsky, Christopher Lasch.

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  4. Il mérite le détour car il a développé dans les années 30, la première grande critique philosophique du néolibéralisme (donc du capitalisme) qui ne soit pas totalitaire (à la mode à l’époque) mais libérale et démocratique. A méditer. D’ailleurs, pas mal de gens s’en inspirent.

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