
« Ce n’est pas un signe de bonne santé que d’être bien adapté à une société profondément malade… »(Krishnamurti)
N’empêche, cette société libérale avancée, à peu près aussi moderne que Valls ou Macron, ces rétropédaleurs poudrés qui nous font du Thatcher/Reagan trente ans après, au-delà de ses dévastations, nous aura bien fait marrer.
C’est déjà ça.
Parce que quand on en vient à supprimer des automates pour défaut de productivité, on touche quasi au sublime.
De quoi de quoi, cette machine qui ne fait jamais grève, qui n’est jamais malade, (mais toujours en panne) qui travaille jour et nuit sept jours sur sept, même s’il faut bien reconnaître qu’elle n’en fout pas lourd le dimanche, qui ne se plaint jamais, ne serait pas, par un surcoût de maintenance, un bon retour sur investissement ?
Serait-ce à dire qu’un humain, par exemple un de ces chômeurs, qui n’attendrait pas tout de l’autre et prêt à se battre pour devenir milliardaire, serait plus avantageux ?
L’heure de la revanche de l’homme sur la machine aurait-elle enfin sonnée ?

Dans le monde idéal de Maître Gattaz, un stagiaire, précaire à vie, tremblant à l’idée d’être jeté sine die sans autre préavis, promis à un brillant avenir de SDF, soumis, docile, non syndiqué, payé 1 euro de l’heure – et encore ne vivrait-il pas au-dessus de ses moyens ? – pourrait certes faire l’affaire.
Un esclave, mieux qu’un esclave puisque ni nourri, ni soigné, ni logé, capable d’initiative, et comble du luxe, que l’on pourrait, contrairement aux machines, humilier, terroriser, abrutir, avec un certain mépris de classe, deviendrait en effet plus rentable que le robot.
Sans compter que question main au cul c’est quand même plus sympa.
Car dans le monde optimisé du profit, de la joyeuse compétitivité et de la rationalisation, dans le cauchemar climatisé du Dieu chiffre et des stats alignées, on gagnerait à privilégier la chair formatée sur la tôle programmée.
D’autant qu’un homme méthodiquement exploité dont on se débarrasserait à la décharge dès lors qu’il serait usé, estropié, casse couilles, polluerait nettement moins et serait d’un bien meilleur ratio question autodestruction.

Aussi redeviendrait-il envisageable de supprimer, escalators et ascenseurs pour y substituer des porteurs, les pompes automatiques au profit de pompistes, les distributeurs automatiques pour les remplacer tenez vous bien par des guichetiers obligatoirement aimables quoique faméliques.
Tandis que dans cette perspective harmonieuse de l’humain réifié mais souriant, les machines vivraient enfin une retraite méritoire.
Oui dans ce monde merveilleux de la calculatrice où l’on aura mis la fin au service des moyens, quelques milliardaires vivront comblés, bien qu’en apesanteur, faute de planète pour y poser les pieds.
Sauf que le capitalisme est plus tordu que ça.
Ni esclave, ni machine, non non, puisqu’au final c’est le consommateur lui même qui fait le travail. C’est lui qui cherche,trouve imprime son billet, lui qui passe ses achats à la caisse, lui qui remplit son réservoir de bagnole et comble de l’ironie, non seulement sans être rémunéré mais en payant pour ça.
Sorte de monde renversé. Comme lorsque vous essayez de réparer les conneries de votre opérateur et qui par une ligne surtaxée en tire encore bénéfice.

Oui dans cette subtile société productiviste, inutile de s’exploiter les uns les autres puisque chacun s’exploite lui-même.
Payer plus pour travailler plus : l’accomplissement rêvé du capitalisme.
Quand même mieux que les machines non ?
tgb
Excellent! Bravo!
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merci Celeste
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Vraiment, on peut s’interroger sur le fonctionnement de la tête chez ces capitalistes en quête permanente d’un « toujours plus » : ils ont déjà tout, pour avoir encore plus il leur faut donc inventer ce plus. Si ce n’est pas de la folie…… Il s’agit d’entasser du vide sur du vide sur du vide….
Nul doute que nombre d’entre eux consultent dans des établissements plein de blouses blanches, où les plus atteints se reconnaissent au stéthoscope dans la poche de poitrine.
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Ils pensent que la vérité humaine tient dans une équation alors meme que c’est leur cupidité qui les mène qua d on voit tout en fric en effet on pense tout en fric et tout le reste n’est qu habillage
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L’homme devenu moins cher, aussi docile que le robot et plus performant. C’est toute la problématique au Japon…
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Sauf qu’au Japon trop de vieux et les autres irradiés
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Excellent constat !
Aux Pays-Bas on a d’abord astreint les guichetiers de NS (la SNCF néerlandaise) a « produire » cinquante billets à l’heure. Fallait pas avoir une mémé qui cherche son portefeuille au fonds de son sac… L’avantage-client ;o) était que tu n’attendais pas longtemps même quand la file était maousse.
Et puis c’était pas assez rapide et trop coûteux. Alors on a installé des automates dans les gares et fermé tous les guichets. C’était pas assez performant encore.
Maintenant on a un autre truc qui est une carte comme la carte bancaire. Tu la « charges », c’est à dire tu mets de l’argent dessus via l’automate bancaire. Tu zappes ta carte à la gare de départ. Et suuurtout tu n’oublies pas de dézapper à la gare d’arrivée faute de quoi tu te fais ramasser jusqu’au dernier centime de ta carte puisque, pauvre con que tu es, tu as laissé le compteur continuer à tourner. Le système fonctionne aussi pour les bus et métros.
Accessoirement tu laisses en permanence du pognon sur le compte du transporteur… Et bien sûr, si tu voyages à trois, faut trois cartes. Tu ne peux pas avoir moins de vingt-cinq euros sur ta carte pour prendre le départ. Avoir en permanence plus de vingt-cinq euros gelés quand tu vas voir ta grand-mère à trois stations de bus…
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Impressionnant et bien vicieux je ne connaissais pas ce système . Oui ces grosses boîtes adorent qu’on leur prête de l’argent . On imagine 25 € bloques sur des centaines de milliers de carte que l’on fait fructifier comme une banque
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Krishnamurti, un vieil ami.
Pas trop de temps en ce moment, mais j essaie de suivre tes billets (… et d’autres ). Tes 2 derniers sont particulièrement fameux . Merci !
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Tu as bien compris mais c’est encore un peu plus plus vicieux que tu ne le penses… Y’a toujours ces petits détails qui font tout le charme de la vie moderne et du progrès qu’on n’arrête pas.
Ta carte est à ton nom, à ton adresse et liée à ton compte bancaire bien sûr néerlandais. Et si tu es un étranger de passage ? Ah ben tu n’as pas de carte (faut un délai de trois semaines environ pour la faire), tu es en infraction, tu paies « donc » une amende en prenant ton billet. Sans même savoir que tu paies un surcoût qui est de fait une amende. Salée. Tu trouves juste que putain, c’est hachement cher, les transports publics aux Pays-Bas…
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@turandot toujours content de te voir passer – tu commençais á manquer – bises
@un partageux – c’est pourquoi en Hollande il est recommandé d’aller avec son vélo
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D’ailleurs, payer pour aller bosser ne choque plus grand monde…
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On s’habitue à tout on finit par trouver le pire normal et on enjambe les sdf en pensant à autre chose
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Très belle analyse.
Le capitalisme me fascine dans son absurdité et sa perversité qui touche au génie ou à une forme d’art.
Dans la meme veine que ton article
, les grandes boîtes ont eut l’idée de faire finir leurs produits aux consommateurs. C’est une forme d’externalisation du service après vente. En gros le consommateur doit investir de son temps pour faire marcher le produit acheté. Faut installer les logiciels/les drivers sur son ordinateur (m’a fallut employer 2 spécialistes pour installer une webcam), faut monter son meuble Ikea soit même. En gros le consommateur passe une partie de son temps libre à faire fonctionner les produits qu’il achète, il doit se former a son utilisation, à leur upgrade constant.
Ça me rend fou. C’est pour ça que parfois je finis par acheter un produit apple parce qu’au moins ça marche tout seul. Pas besoin de passer son dimanche ou un doctorat pour le faire fonctionner.
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C’est vrai qu’avec Ikea on est tous devenu menuisier sans en avoir la technique ou le talent . Mais faut reconnaître que çe système á de la ressource et de l’imagination quel dommage qu’il ne mette pas sa créativité au service d’un monde meilleur
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