S’habiller de la peau des autres

Le pas cher finit toujours par coûter la peau du cul.

Exemple : un futal à 10 euros chez Carrouf, peut coûter la coquette somme de 500 morts et 1000 blessés au Bengladesh.

Somme modique certes pour quelque distributeur jouant de la réduction des coûts et de la marge arrière, mais assez onéreux en termes d’image.

Qu’après, faut gérer la crise, douiller du communicant, tartiner de l’humanitaire et de la charte éthique, se ripoliner la marque par de la charité.

Heureusement ça passe…derrière les gravats, les affaires continuent. Le consommateur à caddy n’ayant guère de mémoire, the business must go on !

Il en va de la fringue comme du plat cuisiné de cheval, comme du Fukushima discount, comme de tout low coast qui ne se respecte pas, ça rogne forcément sur la qualité, la sécurité, l’écologie et le social, bref toutes ces broutilles qui font la pérennité d’une civilisation.

A toujours tirer sur les prix – l’esclavagisme libre et non faussé ou le camp de travail étant l’aboutissement naturel du « dumping » social – y’a forcément quelqu’un qui raque à la fin, au bout du bout de la grande chaîne de la sous sous sous-traitance et forcément quelqu’un qui en palpe aussi.

Evidemment quand on exalte le « modèle allemand » et ses mini jobs à 4€ de l’heure, on ne laisse guère d’autre choix au crève la dalle que de s’habiller avec la peau de l’autre. Un plus crève la dalle que soi.

La pauvreté se nourrissant de la misère et vice versa.

Il participe ainsi, conscient ou pas à la spirale morbide du nivellement par le bas, de la paupérisation, du cercle vicieux préparant à la dèche mondialisée et au chaos.

Dans une de ces fulgurances obscènes dont il nous accable et que nous avons l’amabilité en général de ne pas lui resservir, vu que personne ne lit ses bouquins qu’il n’écrit d’ailleurs pas, Jacques Attali expert visionnaire déclare en sa lucide suffisance :

– Nous avons trop de pouvoir d’achat !

Apprécions ce « nous » sans doute de majesté et répondons lâchement par le truchement de l’excellent Emmanuel Todd :

« La notion d’austérité est véhiculée par des pourris, des gens qui ne sont pas nets…Toute personne qui prône l’austérité devrait faire l’objet d’une enquête de moralité »

Oui, si ce monde possédait encore une once de décence un zest de justice, c’est par exemple, monsieur Jacques le pontifiant, qui irait ramasser les cadavres à la pelle des femmes et des gosses ensevelis à Dacca, ces pertes et profits de la compétitivité létale et du grand capital à la mouise enrichie.

N’empêche, nous avons aussi notre part de responsabilité. Même avec moins d’argent, surtout avec moins d’argent, nous avons la responsabilité d’acheter moins, d’acheter mieux, d’acheter nécessaire et durable et aussi paradoxal que cela est, d’acheter le juste prix.

C’est le seul prix à payer.

tgb

Publié par rueaffre2

TG.Bertin - formation de philo - consultant en com - chargé de cours à Paris 4 - Sorbonne - Auteur Dilettante, électron libre et mauvais esprit.

8 commentaires sur « S’habiller de la peau des autres »

  1. Le silence autour des responsabilités dans cette chaine alimentaire appliquée au genre humain m’effraie beaucoup plus que l’info du cadavre dévorée par des vautours.

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  2. c’est l’humanité tout entière dévorée par les vautours et les distributeurs étant des annonceurs publicitaires essentiels aux médias on ne risque pas de trop en analyser les mécaniques

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  3. Les espèces parasites comme les vautours sont utiles à la nature et à la vie, laissons les tranquilles. L’humain est devenu nuisible pour toutes les espèces et au final pour lui-même, saura-t-il réagir pour inverser cette tendance? Là est la question. Cet article permet d’en avoir la conscience, de la faire vivre et espérons le de motiver un changement. En tout cas je le diffuse, comme beaucoup de tes articles, à mes contacts.

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  4. merci pour cette diffusion je crains que ça ne parle qu’aux convertis déjà mais ce n’est pas uen raison pour se résigner

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  5. Il est désolant de constater que beaucoup ne sont pas convertis, justement. Que de blogueurs « de gouvernement », par exemple, prêts à dire que tout va bien, tout va aller encore mieux bientôt, alors que l’évidence crève les yeux : de jour en jour cela va de plus en plus mal, insidieusement, ou brutalement comme à Dacca.
    L’humain ? Un hoquet de la nature. Il y a une quinzaine je visitait un parc, où entre autres primates vivaient dans l’harmonie une quinzaine de bonobos. Homo sapiens a l’agressivité du loup en meute, l’intelligence en moins, et le manque de scrupules de la hyène. Lui passé, restera un désert.

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  6. ahhhhh les jeunesses hollandaises un bien beau sacerdoce – blogueur de gouvernement ça doit faire chic sur une carte de visite
    un désert dont l’homme aura trouvé le moyen de pourrir le sable faisons lui confiance

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  7. Un bon billet, une fois de plus.
    « … nous avons la responsabilité d’acheter moins, d’acheter mieux, d’acheter nécessaire et durable et aussi paradoxal que cela est, d’acheter le juste prix. »
    Je plussoie. Le consommateur se doit d’être citoyen, donc responsable. Trop facile de toujours rejeter la faute sur un autre, qu’il soit « au dessus » ou « en dessous » de soi.

    « je crains que ça ne parle qu’aux convertis déjà mais ce n’est pas une raison pour se résigner »
    Putain, non, pas question de se résigner. Quand bien même la possibilité d’une quelconque victoire semblerait s’éloigner, plus que jamais la vie est dans le combat.
    Quelle que soit l’issue, il paraît qu’au bout il y a la mort, alors autant se sentir vivant avant que ça n’arrive…

    Quand la température grimpe, le cactus se trouve une place.

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  8. justement la seule chose que j’ai jamais réussi à faire pousser est un cactus – faudra que je lui consacre une note un de ces jours – le cactus ça peut traverser un désert et pousser quand même
    nous sommes tous des cactus !

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