Le peuple, pas la populace

Quand vient l’heure de l’adversité, tous deviennent courageux contre celui qui tombe. Lord Byron

Je n’ai jamais eu de goût pour le résistant de la 25ème heure.

Pour l’héroïque partisan de la tondeuse sur les femmes qui « couchèrent avec le boche ».

Pour les Charia Hebdo tout confort, forts avec les faibles, faibles avec les forts.

Pour la provoc du beurre, de l’argent du beurre et du cul de la moukère.

Je n’ai que dégoût pour les meutes haineuses qui conspuent l’homme à terre.

Pour les Franz Olivier Giesbert qui lèchent, lâchent et lynchent puis en font un bouquin.

Pour tous ceux qui hurlent avec les loups quand ça ne risque plus rien.

Pour les foules hargneuses, qui soulagent leurs rancoeurs sur l’homme seul.

La foule est un con.

Je n’en partage ni l’ivresse bestiale, ni l’hystérie de l’instinct.

C’est pourquoi je ne prends aucun plaisir à voir partir Berlusconi sous les crachats.

D’autant que le peuple, si peuple il y a, n’y est pas pour grand chose, qu’il pourrait en avoir au moins cette conscience là, et que ce qui se profile pourrait bien être plus terrifiant encore.

Si je n’ai que mépris pour ce triste Silvio, ce clown fardé, ce pitre lifté, ce populiste pitoyable pour concierges, ce Bernard Tapie mafieux, je le renvoie volontiers à sa momie, tant même à terre, il conserve empire et pouvoir de nuisance.

S’il est un pire danger aujourd’hui, ce n’est pas le guignol congédié par les marchés qui part mais bien les techniciens du mécano bancaire recrutés par l’oligarchie, qui arrivent .

Car l’ennemi aujourd’hui n’est plus le démagogue vulgaire, le Mussolini à paillettes, le téléfasciste racoleur mais bien ce système clinique, autrement plus sournois et pernicieux, faits de bureaucrates interchangeables à la norme iso 9001.

Les ennemis aujourd’hui ce sont ces golden boys formatés, Draghi, Monti, Papademos, ces serviteurs dévoués, conçus in vitro dans le même Sachs, ces techniciens lisses et insipides du sale boulot et de la dissection des nations.

Je ne pensais pas qu’on serait tombé si bas, qu’un jour peut être, j’irais à regretter les marionnettes poujadistes, ces enfants de la télé, cabotins capricieux et incultes.

Car, au moins, avant l’arrivée des hommes machines du projet kafkaïen, avions nous à faire, dans toute leur médiocrité, leur veulerie et leur petitesse, à des humains encore.

Et il faut être bien con ou bien banquier, pour penser que des comptables surdiplômés sachent diriger adroitement et sans désastre les peuples.

Les administrer peut être

les gérer tout au plus,

avant le chaos.

C’est donc bien quand les ennemis sont au faîte de leur gloire et de leur toute puissance qu’il faut mordre et cogner.

Si je n’ai guère de goût pour la basse vengeance, le défoulement des lâches, le lynchage de Kadhafi, j’ai de l’inclination pour la lutte finale et la revanche de classe.

Encore faudrait-il qu’au-delà des jets de quolibets et des manifs folkloriques, le peuple, s’il existe, ne s’abaisse pas au rang répugnant de populace.

On ne se grandit pas à humilier.

Qu’entre la masse statistique tout à l’adoration de ses idoles et la foule enivrée d’elle-même zappant son petit père des pipoles, le peuple se soulève pour mieux s’élever encore.

Quand viendra le jour, et il n’est pas si lointain, où notre paltoquet à nous aura le nez dans son fumier, je serai le premier à revendiquer pour sa dignité.

Ne serait-ce que pour bien montrer que le peuple, s’il existe, peut avoir autrement plus d’élégance et d’humanité que le dernier des ploutocrates.

tgb

Publié par rueaffre2

TG.Bertin - formation de philo - consultant en com - chargé de cours à Paris 4 - Sorbonne - Auteur Dilettante, électron libre et mauvais esprit.

15 commentaires sur « Le peuple, pas la populace »

  1. Une foule en délire, est rarement inspirée vers l’humanité, mais plutôt vers la bêtise dupliquée…
    Il existe pourtant des moments magiques dans la Lutte où on ressent pourtant le frisson du partage humain !
    Un ressenti personnel, fort et sensible pulsé par le collectif.

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  2. Pareil : il n’y a rien à jeter
    Ce texte fait penser à la gamine décrite par M. Audiard et découverte par lui morte, martyrisée, au pied d’un arbre à la libération de Paris par ces fameux résistants de la 25ème heure
    Quant à ces fameux ‘ techniciens ‘ tout est dit d’autant qu’il s’agit d’une vieille lune présentée comme une idée neuve par nos pénibles journaleux

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  3. tiens, oui je me souviens avoir lu cette histoire racontée par Audiard. Elle est bouleversante. Et pour ce qui est de la vieille lune montrée par le doigt on sait ce que le journaleux servile regarde…

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  4. Eh oui, tu pointes un symptôme de ce que j’expliquais en commentaire de ton précédent billet ( sur la définition du peuple ) .
    Le peuple c’est la volonté générale, librement exprimée, et « en actes ».

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  5. Un beau et bon billet, où derrière les idées le sensible affleure plus encore que d’habitude.
    « On ne se grandit pas à humilier »
    C’est vrai.
    Et c’est, je crois, la seule chose que je crains vraiment lorsque je pense à la révolution… ces parts d’ombre de l’humain, si difficiles à canaliser, où lâcheté et cruauté se mêlent et qui profiteraient bien d’une telle occasion pour s’exprimer sans plus trop de réserve, gangrenant dès les premières lignes cette nouvelle page à écrire.
    Allez, compañero, combattons parce qu’il faut combattre et pas parce qu’il faut gagner.
    Avec élégance et humanité.

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  6. @urbain « Quand, l’oeil fixe, et debout sur sa grève sacrée,
    Et pensif, on attend l’heure de sa marée. – Au peuple – « http://www.victor-hugo.info/poemes/365.html
    @dav – oui contrairement à leur leit motiv – il faut se soumettre car il n’y a pas d’autre choix » il faut se battre parce qu’il n’y a rien à faire d’autre

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  7. Excellent, tgb. Total respect.
    Une fois de plus, tu exprimes ce que je pense et ne saurais faire aussi brillamment.
    En effet, leur cracher dessus quand on ne les craint plus ne grandit personne. C’est quand il était omnipotent et nuisible qu’il fallait le virer.
    D’autant que le « peuple » devrait s’indigner qu’on lui enlève sans rien lui demander son chef d’état qu’il a malgré tout élu, même si les élections sont bidonnées, évidemment, pour le remplacer par un autocrate, marionnette des « marchés », qui va les spolier de tout, puisqu’il est là uniquement pour ça.
    Ce qui montre clairement, d’autre part, et cela devrait sauter aux yeux du plus stupide d’entre nous, que la « démocratie » dont ils se gargarisent dans les discours, ils s’en tapent. Il serait temps que le peuple voie à travers ce double discours et ne laisse personne virer ses élus à sa place.
    Voir cette vidéo édifiante sur le discours mensonger de ceux qui nous gouvernent, Obama en tête: http://www.youtube.com/watch?v=rfN9yBape1M
    Une vidéo à montrer dans les écoles quand on sera débarrassés de cette engeance.
    Enfin, si … Parce que c’est pas gagné.
    NB: BHL aurait dit que l’assassinat de Kadhafi ferait « jurisprudence ».
    Il est limpide aujourd’hui que ceux qui ne veulent pas partir d’eux-mêmes seront assassinés sans merci. Message transmis à tous les chefs d’état, même européens.
    Assad, Ahmadinejad, Chavez, Castro et les autres: c’est la soumission ou la mort, désormais.
    Une fin du monde en apocalypse 😉
    Euh, bon, pour sarkozy, je crois que j’éprouverais quand même un certain plaisir à le voir débarrasser l’Elysée avec perte et fracas. Mais c’est juste perso 😉 Je ne sauterais pas de joie pour autant. Sauf si c’est nous qui le faisons fuir à Varennes.

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  8. évidemment que ce sera sacrément plaisant et ça viendra de dégager Sarko et de le traduire en justice mais et tu le sais bien ce n’est pas une affaire de personnes mais bien de système.
    En tout cas que le capitalisme dans toute sa crudité tombe le masque c’est toujours ça de gagné. La bête est blessée à mort, elle en est d’autant plus dangereuse elle fera des dégâts mais elle finira par crèver. C’est inéluctable.

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  9. « tu le sais bien ce n’est pas une affaire de personnes mais bien de système »: tout à fait, et je ne me fais aucune illusion sur son éventuel remplaçant. Sauf que je ne vois pas pire, ce qui voudrait dire qu’on va se le cogner encore un bout de temps.
    Pendant ce temps, il joue les justiciers, cet imbécile, croyant être à l’abri.
    Oui, le système est moribond, mais j’ai bien peur que nous ne sortions pas indemnes de cette folie meurtrière. Ils ont un pouvoir de nuisance phénoménal.
    Quant au débat politique, il est nul, actuellement. Plus ça nous tombe dessus, plus on se raccroche à des hommes (voire femmes) providentiels qu’on va pêcher dans le même marigot.

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  10. Alors qui ( comme homme/femme providentiel(le) ) ?
    La souveraineté du peuple ne se re-présente pas, ni ne se délègue ,
    et la première nécessité politique est de s’affranchir de ce qui est son simulacre : l’opinion … et ceux qui la font.
    Élections : piège à cons.

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  11. et bien nous voilà d’accord, j’ai écris un billet « sérieux » sur le même sujet, mais en dérision c’est pas mal.
    quant à ceux qui ont ce mot d’ordre qu’on entend depuis que les élections existent (oui ceux qui l’ont pas les réclament) devraient plutôt se pencher sur l’information et les médias… les pièges à cons ils sont là.

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